MARGIN CALL de J.C. Chandor (2012)
Fin 2008, à New York. Une banque d’investissements est le théâtre d’un étrange ballet. Dans un open-space en pleine effervescence, Peter et Seth, deux jeunes traders, observent fébrilement la valse des cartons d’une poignée de licenciés. Parmi les victimes de ce plan social, leur patron Eric Dale, chargé de l’analyse des placements à risque. En reprenant les travaux de son chef, Peter est loin de se douter qu’il va passer la nuit la plus longue de toute sa vie…
COMMENT UNE POIGNÉE DE COLS BLANCS A PRÉCIPITÉ LA CRISE DE 2008
Il est fascinant de voir comment un premier film peut frapper aussi juste malgré un sujet mainte fois éculé. En effet, J.C. Chandor n’est pas le seul à avoir traité de la crise financière de 2008. Certains s’y sont attaqués frontalement par le biais du documentaire, comme les excellents Inside job de Charles Ferguson et Cleveland contre Wall Street de Jean-Stéphane Bron. D’autres ont piétinés dans leurs tentatives de fictions glamour à l’image d’Oliver Stone avec Wall Street 2. Ici, J.C. Chandor, dont le père a travaillé 39 ans pour la banque d’affaire Merrill Lynch, reprend le genre du thriller boursier. Mais plutôt que de décortiquer la mécanique des chiffres, le réalisateur autopsie les rapports sociaux et le fonctionnement hiérarchique. Pas étonnant alors que le spectateur se sente aussitôt claustrophobe. Enfermés dans leur tour de verre, des clowns en col blanc jouent une comédie de l’absurde. Alors que le jeune Peter (Zachary Quinto) transmet un rapport d’activité des plus édifiants, ses supérieurs (Kevin Spacey, Simon Baker, Demi Moore) se renvoient la balle à l’infini. Au sommet de la pyramide décisionnaire, un PDG (Jeremy Irons) qui ne s’embarrasse pas de détails, ou, sans doute, n’y comprend-il pas grand-chose… Plus terrifiant encore est le vertige ressenti par des spéculateurs peu soucieux des conséquences de leurs actes. Chandor filme quasi-exclusivement à l’intérieur des bureaux. De là, les hommes dominent le monde avec une jubilation non feinte. Au cœur de la nuit, sur le toit du building, un trader (Paul Bettany) joue à se faire peur en escaladant une rambarde. Soudainement, on perçoit l’étourdissant pouvoir de ces prestidigitateurs qui font et défont l’économie du monde. Quant à Eric Dale (Stanley Tucci), personnage inspiré par le père du cinéaste, il regrette l’époque où, ingénieur, il avait des projets concrets auxquels se raccrocher. Car le problème est là : à force de manipuler du virtuel, les pantins de la finance n’ont plus de connexion avec la réalité. Et dans ce milieu du risque standardisé et du cynisme généralisé, on suffoque. Tourné en 17 jours, Margin Call reflète l’urgence qui a animé le monde les premiers mois de la crise. Par sa réalisation clinique, Chandor montre avec finesse comment une poignée d’individus a plongé sciemment la société dans le chaos.
Titre : Margin Call / Pays : USA/ Durée : 1h47/ Distribué par ARP Sélection/ Sortie le 2 Mai 2012
Deux acteurs que j’aime (Irons et Spacey), plusieurs bonnes critiques dont la tienne, ça me donne envie!
Très bon film car le sujet est finement analysé. Les acteurs sont tous excellents.
effectivement bon film même si je continue à penser qu’il filme ces traders avec un brin de complaisances dans certains passages.