THE WE AND THE I de Michel Gondry (2012)
Présenté cette année à la Quinzaine des réalisateurs et récompensé au dernier festival américain de Deauville (prix de la critique internationale), The We and the I s’annonce déjà comme la tornade cinématographique de la rentrée. Il faut dire qu’à chaque projet, Michel Gondry a l’art de nous surprendre en empruntant des chemins peu balisés au cinéma. Avec Eternal Sunshine of the spotless mind (Oscar du meilleur scénario original en 2005), La science des rêves, Soyez sympa, rembobinez ou encore The Green Hornet, il s’est forgé l’image d’un cinéaste atypique et touche à tout. Son incursion dans le documentaire, musical avec Dave Chappelle’s block party, familial avec L’Epine dans le cœur, n’a fait que confirmer l’éclectisme de son travail. Seuls points communs entre ses films, un imaginaire débordant et une manière artisanale d’aborder la mise en scène. Avant sa très attendue adaptation du roman de Boris Vian, L’écume des jours (avec Audrey Tautou, Romain Duris, Omar Sy) prévue pour 2013, le voilà lancé dans une étrange étude sociologique à bord d’un bus sillonnant le Bronx. Ni documentaire, ni film, ou justement un peu des deux, The We and the I croise les vies de lycéens au dernier jour de l’année scolaire. Structurée en trois actes, l’intrigue (ou plutôt les intrigues) se déploie dans un mélange de bonne humeur et de brutalité. L’ambiance est sympa, les vannes fusent et la musique est cool. Pourtant, il se joue ici une pièce de théâtre d’une rare cruauté. Dans ce véhicule roulant à toute allure, des ados restituent avec délectation la férocité des rapports humains. Au fond du bus, des bourreaux martyrisent une vielle femme et s’adonnent à quelques petites humiliations, tandis qu’à l’avant, bavardages et rêveries couvrent les bruits de la violence ordinaire. Au fil des conversations, chaque personnage dévoile peu à peu ses forces et ses faiblesses. Emergent alors des relations amoureuses compliquées, des troubles psychologiques et des complexes en tout genre. On constate surtout le degré de soumission auquel s’abandonne cette poignée d’adolescents agités. Mais ce n’est pas tant la violence physique et verbale qui déconcerte que le détachement avec lequel ces jeunes donnent et reçoivent les coups. Comme dans cette vidéo qui tourne en boucle sur leurs téléphones (un garçon tombant sur un sol beurré), tout glisse sur eux avec indifférence. C’est alors qu’un évènement oblige certains à une remise en question personnelle… Avec The We and the I, Michel Gondry nous offre une belle partition de cinéma. A la fois libre et maîtrisé, le film est porté par la fraîcheur d’une bande de lycéens à la langue bien pendue. Jouant ici leurs propres rôles, ces élèves du Bronx ont travaillé trois ans avec le cinéaste. En résulte un trajet urbain passionnant, parabole d’une longue route introspective.
Titre : The We and the I/ Pays : USA/ Durée : 1h43/ Distribué par Mars Distribution/ Sortie le 12 Septembre 2012
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