DONOMA de Djinn Carrénard (2011)
Une prof d’espagnol au tempérament de feu, un cancre pickpocket et charmeur, une jeune athée qui entend l’appel de dieu, une photographe téméraire en amour, un garçon désargenté et entretenu, une fille cancéreuse et tyrannique… Autant de personnages dont les les destins s’entremêlent pour raconter la jeunesse d’aujourd’hui.
Quel drôle de défi s’est lancé Djinn Carrénard ! Après une série de courts métrages et la réalisation de quelques clips, ce trentenaire d’origine haïtienne, élevé entre la Guyane et Paris, a choisi de tourner un film sans argent et sans réseau. Avec ses 150 € de budget et sa communication offensive, Donoma a vite fait le tour des rédactions. Mais peu importe le buzz qui a accompagné le film, revenons plutôt sur le fond. L’idée est séduisante car elle rebat les cartes de l’écriture cinématographique. A la fois réalisateur, scénariste, monteur, producteur et distributeur de son long-métrage, Djinn Carrénard est l’homme orchestre d’un projet particulièrement inventif. Délesté de toute pression extérieure, le film peut laisser libre cours à la spontanéité et s’aborder comme un terrain de jeu jouissif. Gommant les frontières entre Paris et sa banlieue, le film nous laisse la simple vision d’une métropole urbaine où les personnages glissent d’une scène à l’autre. Cette sensation de fluidité se ressent aussi dans la temporalité. Passé, présent, avant, après… Rien n’est réellement figé dans le récit. Les scènes se lisent dans le désordre sans que rien ne perturbe la narration. Et puis, il y a ces histoires surprenantes, passionnantes, terribles, qui révèlent des femmes et des hommes complexes. Au fil des mots, Dacio, Analia, Dama, Salma, Leelop et les autres tombent le masque, nous faisant partager leurs questionnements et leurs doutes. De leurs relations intenses et conflictuelles, surgit une réflexion sur le couple, l’identité, les origines, la religion et même le rapport à l’argent. La vivacité des dialogues, l’humour à chaque phrase, dynamise un film qui aurait pu être plombé par ses thématiques parfois hasardeuses. Emmené par une formidable troupe de comédiens, qui alterne entre textes écrits et improvisation, Donoma (Le jour est là, en langue sioux) est une oeuvre qui porte bien son nom, car elle annonce un renouveau. Aussi spontané que maîtrisé, le premier film de Djinn Carrénard apporte une bouffée d’air à un cinéma français qui s’empâte. Le fait qu’il existe et qu’il réussisse à être distribué (malheureusement que quelques salles dans toute la France) est en soi un petit miracle et un signe de résistance face aux grosses cartouches qui cannibalisent le cinéma.
Titre : Donoma/ Pays : France/ Durée : 2h13/ Distribué par Donoma Guerilla /Sortie le 23 Novembre 2011
J’ai adoré, la naissance d’un réalisateur de talent, c’est beau !
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